Dédiée tantôt au commerce, tantôt à l’accueil des souverains, ou encore espace de refuge, de divertissements ou de châtiments, la place Foire-le-Roi fût un lieu aux multiples facettes.
Le développement de la place
Elle doit son nom au roi Jean le Bon (1350-1364) qui voulut taxer les marchandises débarquées sur le port de la place pour la foire de la Saint-Christophe (15 septembre). Elle prit ainsi le nom de « Fère-le-Roi » puis de « Foyre-le-Roi ». Dans sa forme originelle, la place faisait le double de la place actuelle. Selon les estimations de Bernard Chevalier, elle devait mesurer environ 150 mètres de long pour une centaine de mètres de large [Chevalier, 1983, p. 34]. La plus importante entreprise de réduction de sa superficie eut lieu dans les années 1470-1471. L’abbaye Saint-Julien décida de lotir la partie de la place Foire-le-Roi appartenant à son fief. Le roi donna son autorisation le 25 mai 1471 à condition d’obtenir l’accord des officiers et de la municipalité qui s’y opposèrent. L’affaire fut plaidée devant les tribunaux au Grand Conseil d’abord puis au Parlement. En 1473, le monastère s’accorda avec le seigneur du Péage dont le fief comprenait l’autre partie de la place. Dix ans plus tard, en 1484, la place avait perdu la moitié de sa taille au profit de nouvelles maisons [Chevalier, 1983, p. 222-223].
Un lieu de vie et de commerce
Très tôt, la place a développé une activité commerciale qui en a fait un espace incontournable de la cité. Elle bénéficiait de la présence d’une poissonnerie et d’une boucherie. En 1428, la municipalité prend la décision de pérenniser les boucheries nouvelles installées à cet endroit [Chevalier, 1983, p. 70-71] et ce malgré les contestations, les questions d’hygiène et les incommodités dues aux odeurs. La place accueillait également une foire deux fois par an. Si la présence de ces foires sur la place fait débat avant 1545, leur organisation à partir de cette date est incontestable. François Ier accorde en effet à la cité deux foires franches par an [Catalogue des actes de François Ier, T. 4, p. 765].
La place devait également sa place centrale dans Tours à son port qui permettait le débarquement des marchandises acheminées par la Loire.
Signe de l’importance de cette place dans la vie tourangelle, de grandes familles décidèrent de s’y installer. Les Gaudin y firent bâtir un hôtel particulier. Philibert Babou en hérita par sa femme et en fit l’hôtel de La Bourdaisière, encore visible aujourd’hui au n°10 . Philibert participa activement au développement de cette place. Il joua un rôle dans la décision de François Ier d’accorder deux foires franches à la cité. Il participa également pour qu’une fontaine fut installée devant son hôtel particulier [Domec, 1987, p. 796-797].
Un lieu d’accueil et de divertissement
La place Foire-le-Roi fut à plusieurs reprises le lieu d’accueil des souverains. Leurs visites à Tours étaient l’occasion d’entrées solennelles somptueuses. Généralement, le corps de ville ou une délégation de celui-ci se portait au-devant des souverains par bateau. Les hôtes et les échevins accostaient alors au port de la place Foire-le-Roi. C’est le cas pour François Ier le 21 août 1516 [Giraudet, 1883, p. 195] et plus tard pour Henri II, le 18 mars 1556 [Giraudet, 1883, p. 208]. Le lieu revêtait alors son costume de fête et devenait un espace de représentations théâtrales [Chevalier, 1983, p. 34]. Le Mystère de la Passion fut mis en scène pour Charles VII en novembre 1457 [Giraudet, 1883, p. 140-141] et celui des Hercules fut joué pour François Ier en 1516 [Giraudet, 1883, p. 195]. La place Foire-le-Roi était la première image que les hôtes voyaient de la cité et le point de départ d’une faste procession urbaine.
La place n’accueillit pas que des hôtes de marque. Sa superficie en faisait le lieu tout indiqué pour recevoir les réfugiés. En temps de guerre et d’insécurité, les habitants des environs venaient trouver asile à l’intérieur des murs de la cité. La place, par sa superficie, était à même de les recevoir en attendant qu’ils puissent rejoindre leur foyer [Chevalier, 1983, p. 97].
La place joua aussi le rôle de pilori et était le théâtre d’exécution. Celle du 11 février 1488 resta dans les mémoires comme le jour où le peuple assomma le bourreau pour n’avoir pas su exécuter un faux monnayeur qui avait été condamné à être bouilli puis pendu [Giraudet, 1883, p. 180].
La place Foire-le-Roi endossa divers rôles qui en firent un lieu de vie dynamique incontournable de la ville de Tours à la Renaissance.
Bibliographie
Chevalier Bernard, Tours ville royale, 1356-1520, Chambray, C.L.D., 1983.
Domec Pierre, « Les six fontaines Renaissance de Tours », dans Bulletin de la Société archéologique de Touraine, T. 41, 1987, p. 783-804.
Giraudet Eugène, Histoire de la ville de Tours, T. 1, Tours, 1883.
Marichal Paul, François Ier, Catalogue des actes de François Ier, Tome 4, Paris, Imprimerie Nationale, 1890.